Déclarations et discours : Commissaire aux élections fédérales

Allocution du
commissaire aux élections fédérales

pour sa comparution devant le
Comité sénatorial permanent des Affaires juridiques et constitutionnelles

13 avril 2017

Seul le texte prononcé fait foi

Merci, Monsieur le Président.

Je suis très heureux d'être ici aujourd'hui pour assister le Comité permanent dans son examen des rapports de l'ancien directeur général des élections, qui portent sur l'élection générale de 2015, y compris son rapport sur les modifications législatives qu'il a recommandées.

Je suis accompagné de Marc Chénier, avocat général et directeur principal des Services juridiques de notre Bureau.

Comme vous le savez, le mandat du commissaire aux élections fédérales est de veiller à l'observation et au contrôle d'application de la Loi électorale du Canada et de la Loi référendaire.

Rapport de recommandations du directeur général des élections

Le Rapport de recommandations de l'ancien DGE contient une série d'éléments qui visent expressément à renforcer le régime d'observation et de contrôle d'application institué dans la Loi électorale du Canada. Ces recommandations ont une incidence directe sur le mandat de mon Bureau.

J'aimerais en souligner quelques-unes, qui sont particulièrement importantes à mes yeux.

Premièrement, je tiens à souligner l'importance d'accorder à un tribunal supérieur le pouvoir, dans certaines circonstances et dans des conditions strictes, de délivrer une ordonnance afin de contraindre une personne à témoigner. S'il nous était possible de contraindre des personnes à fournir de l'information dans le cadre de certaines de nos enquêtes, nous pourrions traiter les cas d'infractions graves sans retard indu.

Je signale que le pouvoir de contraindre une personne à témoigner dans les affaires d'infractions électorales n'est pas sans précédent. Il existe déjà dans d'autres administrations au Canada, notamment au Québec.

Par ailleurs, si le Parlement décidait d'accorder ce pouvoir, je m'attends à ce qu'il soit assorti des protections importantes dont je fais mention dans des rapports précédents – en particulier, la reconnaissance du droit à un avocat, la protection contre l'auto-incrimination et la reconnaissance du droit à la vie privée.

Il importe de souligner que ces ordonnances seraient délivrées par des juges indépendants, lorsqu'ils auraient la certitude que les conditions législatives relatives à l'émission de ces ordonnances sont remplies.

Cet outil, qui serait utilisé avec parcimonie, serait essentiel, en particulier s'il advenait un incident majeur qui aurait pour effet de miner la crédibilité du système électoral.

Dans de tels cas, il est primordial d'établir les faits rapidement et de traduire en justice les auteurs sans délai. Autrement, on court le risque que les Canadiens ne fassent plus confiance au système électoral, ce qui n'est pas souhaitable pour la démocratie.

Deuxièmement, j'appuie sans réserve la recommandation du DGE d'établir dans la Loi des sanctions administratives pécuniaires (SAP) pour les infractions réglementaires. J'ai déjà mentionné par le passé que notre système actuel – qui repose en grande partie sur les infractions criminelles et les sanctions – ne permet pas d'appliquer efficacement un bon nombre des dispositions réglementaires prévues dans la Loi.

Les Canadiens s'attendent, à juste titre, à ce que les violations à notre loi électorale soient traitées promptement. Un régime de SAP serait en ce sens extrêmement utile.

Enfin, j'appuie fermement la recommandation de l'ancien directeur général des élections visant à élargir la portée des conditions dont les transactions peuvent être assorties.

En fait, si l'on accordait à mon Bureau la capacité d'imposer des SAP, le montant de la sanction pourrait être négocié dans le cadre de la transaction.

C'est ce que prévoient plusieurs régimes fédéraux : le haut fonctionnaire responsable de l'observation et de l'application de la loi peut négocier le montant de la SAP qui sera imposée dans le cadre d'une transaction, qui comprend d'autres conditions visant à faire respecter les dispositions de la loi à l'avenir.

Le fait de combiner ces deux outils d'observation permettrait de régler efficacement les cas de non-conformité, en permettant l'imposition de conséquences concrètes pour les auteurs.

Réglementation des activités des tiers

Durant la dernière comparution de l'ancien DGE devant le Comité, en novembre dernier, certains honorables sénateurs se sont intéressés à la question de la réglementation des activités des tiers en période électorale.

Comme on le sait, à l'heure actuelle, la réglementation du financement des activités des tiers vise uniquement le financement de publicité électorale en période électorale, c'est-à-dire les dépenses engagées pour la production et la transmission de messages de publicité électorale. Cela n'inclut pas plusieurs autres types de dépenses, comme celles engagées pour la recherche et l'élaboration de politiques, à la condition qu'il s'agisse de dépenses indépendantes qui ne sont pas coordonnées avec un parti ou un candidat.

Il n'est donc pas illégal, par exemple, pour un tiers d'utiliser des fonds de l'étranger pour financer des activités qui n'incluent pas la diffusion de messages de publicité électorale.

Nous avons reçu un nombre considérable de plaintes au sujet de la participation de tiers durant l'élection générale de 2015 – bien plus que ce que nous avions reçu à la suite de l'élection précédente.

Il ressort de ces plaintes que de nombreux plaignants ont l'impression que, dans certaines circonscriptions, la participation des tiers au processus électoral a été d'une telle ampleur que les résultats des élections en ont été indûment affectés.

Il me semble que la participation des tiers au processus électoral canadien continuera vraisemblablement de croître. C'est pourquoi il est peut-être temps que le Parlement revoie le régime des tiers instauré il y a dix-sept ans, dans le but d'assurer que tous puissent continuer à prendre part à la lutte électorale à armes égales.

Conclusion

En terminant, j'attire votre attention sur l'article 510.1 de la Loi, qui a récemment été adopté par le Parlement. En vertu de cette disposition, je suis tenu de préserver la confidentialité des renseignements obtenus dans le cadre d'une enquête.

Ainsi, même si je m'efforcerai de fournir des réponses complètes à vos questions, je ne serai pas en mesure de discuter des détails des plaintes reçues par mon Bureau ou des enquêtes réalisées ou en cours.

Je répondrai maintenant avec plaisir à vos questions.

Merci.



Date de modification :