Commissaire aux élections fédérales – Rapport annuel de 2022 Message de la commissaire
Sujets d’intérêt
Allégations d’ingérence étrangère dans les élections fédérales
Depuis quelques années, la menace d’ingérence étrangère dans nos processus démocratiques est devenue une préoccupation importante pour bon nombre de Canadiennes et Canadiens. Au cours de l’automne 2022, des allégations d’ingérence étrangère dans les élections générales de 2019 et 2021 ont circulé de façon continue dans l’environnement public. La commissaire et son personnel prennent très au sérieux toutes les allégations d’ingérence étrangère.
La CEF et l’ingérence étrangère
- Le terme « ingérence étrangère » n’apparaît pas dans la Loi, mais certaines interdictions visent spécifiquement les étrangers, par exemple, les interdictions sur l’influence indue par des étrangers et sur les tiers étrangers.
- D’autres interdictions s’appliquent à tous, y compris aux Canadiennes et Canadiens. Ces interdictions pourraient constituer de l’ingérence étrangère si elles étaient commises par un étranger. C’est le cas, par exemple, de l’interdiction d’offrir un pot-de-vin pour influencer un électeur ou une électrice qui devient de « l’ingérence étrangère » si l’action d’offrir un pot-de-vin est posée par un non Canadien.
- La Loi définit le mandat de la commissaire et son bureau. La CEF ne peut examiner que les allégations couvertes par les contraventions prévues à la Loi.
- La portée des contraventions est étroite et limitée au libellé de chacune de celles-ci. Par exemple, la Loi couvre l’intimidation à l’égard des électeurs, et non pas à l’égard des candidats. Et, l’intimidation est limitée à certains comportements spécifiques.
- La CEF peut déposer des accusations criminelles et imposer des sanctions administratives pécuniaires en matière d’ingérence étrangère.
Comparutions parlementaires
Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre des communes (PROC) a entamé en 2022 une étude portant sur l’ingérence étrangère dans les élections générales fédérales. Le 1er novembre 2022, la commissaire a témoigné devant ce comité parlementaire afin de décrire son mandat d’observation et de contrôle d’application de la loi et répondre aux questions des parlementaires.
À la suite de la première comparution de la CEF devant PROC, ainsi que de la publication de plusieurs articles dans la sphère publique, un certain nombre de plaintes relatives à des allégations d’ingérence par des acteurs étrangers ont été déposées auprès du bureau.
Examen de la CEF en matière d’allégations d’ingérence étrangère
Généralement, la commissaire ne confirme pas avoir reçu une plainte ou amorcé un examen ou une enquête sur un enjeu particulier puisque la Loi contient des règles qui soulignent l’importance de conserver la confidentialité. Celles-ci visent à protéger notamment le principe de présomption d’innocence et à ne pas compromettre les enquêtes en cours. Néanmoins, la question d’ingérence étrangère pèse très lourdement sur la confiance de la population canadienne envers ses institutions et processus démocratiques. Dans un souci de transparence et pour rassurer les Canadiennes et Canadiens, la CEF a exceptionnellement divulgué que son bureau procède à un examen rigoureux et minutieux des plaintes relatives à l’ingérence étrangère. Bien que cet examen approfondi ait été annoncé en 2023 dans le cadre d’une deuxième comparution de la CEF, le travail en lien à cet enjeu a été entamé dès 2022. Le texte des allocutions qu’a prononcées la commissaire lors des deux comparutions parlementaires se trouve sur son site Web.
Au moment de la publication du présent rapport, aucune mesure formelle n’a été prise. Il convient de souligner que cet examen se fait en toute indépendance du gouvernement, des autres institutions gouvernementales ou publiques, du DGE et de tous les participants politiques pour déterminer si des contraventions à la Loi ont été commises.
Quoi qu’il en soit, il est trop tôt pour présumer si, à l’issue du travail en cours, des mesures formelles seront prises. Toutefois, selon les faits et circonstances du dossier, la commissaire pourrait décider d’en informer la population canadienne le moment venu.
L’importance de la collaboration avec nos partenaires et d’autres intervenants
La présence d’éléments étrangers dans le cadre d’un examen ou d’une enquête – tels que des activités, des personnes ou des entités à l’étranger – peut considérablement accroître le degré de complexité du travail de la CEF, ainsi que le temps et les ressources requises pour le faire. Par contre, cette réalité ne se limite pas aux enjeux d’ingérence étrangère ni au bureau de la commissaire. À ce titre, la CEF travaille continuellement à maintenir les relations collaboratives en place avec divers partenaires et intervenants et à en établir de nouvelles pertinentes à la réalisation de son mandat, tant à l’échelle gouvernementale qu’à l’extérieur du gouvernement.
La commissaire reconnaît l’importance de la collaboration. D’ailleurs, la CEF a des protocoles d’entente avec plusieurs partenaires, comme le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), la Gendarmerie Royale du Canada (GRC) et le Service des poursuites pénales du Canada (SPPC). La CEF collabore avec d’autres intervenants qui jouent un rôle clé en vue de préserver l’intégrité des élections, y compris le Centre de la sécurité et des télécommunications, Affaires mondiales Canada et bien d’autres.
Tout en exerçant son travail de manière indépendante, cette collaboration permet d’assurer plus efficacement le respect de la Loi, de même qu’une réponse pangouvernementale à un enjeu pour lequel diverses parties prenantes jouent un rôle important. À travers ce travail collaboratif, la commissaire peut notamment obtenir de l’information clé à la réalisation de son mandat et rester à l’affût de tout développement quant aux meilleures pratiques en matière d’enquête ou tendances d’intérêt.
La commissaire souligne toutefois le besoin de continuer d’améliorer les canaux de communication et le partage d’information avec des intervenants dans le cadre de son travail d’observation et de contrôle d’application de la loi. Ce sujet pourrait faire l’objet de futures recommandations pour des modifications à la Loi.
Ingérence étrangère : comprendre les rôles de la CEF, du SCRS et de la GRC
L’expression « ingérence étrangère » est communément utilisée pour désigner un grand éventail de circonstances. L’ingérence étrangère est une menace pour la sécurité nationale du Canada et, selon les activités ou les circonstances, elle peut aussi menacer l’intégrité de nos élections.
L’ingérence étrangère est un enjeu complexe qui peut aller au-delà des éléments réglementés par la Loi. La protection de l’intégrité de nos élections nécessite la participation et la collaboration d’une vaste gamme de partenaires et d’intervenants, ainsi que de l’ensemble de la population.
Nous avons tous un rôle à jouer.
Dans le contexte d’élections fédérales, les activités d’ingérence étrangère pour lesquelles la commissaire pourrait agir sont très spécifiques. Lorsqu’il y a des allégations qui touchent à la Loi, la CEF peut mener un examen ou une enquête.
Le SCRS est responsable de recueillir et d’analyser des renseignements sur les activités influencées par des acteurs étrangers qui nuisent aux intérêts du Canada, sont clandestines ou trompeuses, ou représentent une menace pour quiconque. Il peut faire des comptes rendus de menaces à la CEF.
La GRC a la responsabilité d’enquêter les actes criminels et les situations d’ingérence étrangère de façon générale, sans être limitée aux élections fédérales. Cependant, si l’acte répréhensible constitue une contravention à la Loi, seule la commissaire peut déposer des accusations criminelles ou émettre un procès-verbal de violation.
Contribuer à la protection des élections fédérales au Canada
Au-delà du travail collaboratif de la commissaire et ses partenaires, la population canadienne peut aussi aider à protéger le système démocratique canadien en signalant toute situation qui pourrait contrevenir aux règles de la Loi, y compris toute activité d’ingérence étrangère dans les élections fédérales.
Pour appuyer leur plainte, ces personnes sont encouragées à communiquer avec la CEF dès que possible et devraient fournir des renseignements tangibles avec le plus de détails possible.
Recommandations de changements législatifs
La Loi prévoit qu’à la suite d’une élection générale, la commissaire propose des changements législatifs en vue d’améliorer l’observation et le contrôle d’application de la Loi.
C’est à ce titre qu’en juin 2022, le commissaire sortant, Yves Côté, a publié un rapport de recommandations signalant les modifications législatives qu’il estimait nécessaires afin d’assurer un meilleur respect de la Loi.
La commissaire appuie les recommandations de son prédécesseur. Elle compte également formuler d’autres recommandations au législateur afin d’avoir les outils et ressources nécessaires pour faire respecter la Loi et protéger l’intégrité des élections.
Par exemple, les thèmes suivants pourraient faire l’objet de futures recommandations législatives de la part de la commissaire:
- Élargissement du domaine d’application du régime des SAP pour couvrir un plus grand nombre de dispositions de la Loi au-delà de celles proposées par le commissaire sortant, y compris en matière d’ingérence étrangère, et pour supprimer la preuve d’intention pour les contraventions administratives;
- Augmentation du montant maximal des SAP, ce qui nécessitera aussi la hausse des montants des amendes qui pourraient être imposées par la cour, afin d’assurer que les montants des SAP n’excèdent pas ceux des amendes;
- Ajout de pouvoirs de collecte d’éléments de preuve visant des personnes ou des entreprises situées à l’étranger, comme le permet la Loi sur la concurrence;
- Ajout d’outils d’enquête administrative pour simplifier le processus d’obtention de la preuve dans les enquêtes administratives, comme on retrouve dans la Loi canadienne anti-pourriel;
- Modifications afin de faciliter l’échange d’information avec certains organismes et partenaires gouvernementaux, de même qu’au niveau international.