Commissaire aux élections fédérales – Rapport annuel de 2018-2019

Message du commissaire

Il me fait plaisir de présenter le rapport annuel 2018-2019 du Bureau du commissaire aux élections fédérales (CEF).

Beaucoup de choses ont changé pour notre Bureau au cours d'une période relativement courte. En effet, le changement a été le thème principal de notre organisation depuis environ un an. Vous en apprendrez davantage sur ces changements tout au long du présent rapport, mais ces changements expliquent aussi en partie pourquoi ce premier rapport annuel indépendant couvre une plus longue période (du 1er avril 2018 au 31 décembre 2019) que celle qui est habituellement présentée. À l'avenir, j'ai l'intention de faire rapport chaque année sur les travaux effectués par notre Bureau entre le 1er janvier et le 31 décembre.

Projet de loi C-76

Au cours des vingt derniers mois, un certain nombre de développements majeurs me viennent inévitablement à l'esprit. Parmi les plus importants, on peut citer les vastes modifications législatives apportées par le projet de loi C-76, qui a reçu la sanction royale en décembre 2018. Bien que le moment de l'adoption de ces modifications, dont certaines ne sont entrées en vigueur qu'en juin 2019, ait posé certaines difficultés en ce qui concerne la formation et la mise en place de nouveaux programmes si peu de temps avant l'élection générale à date fixe, elles ont également apporté de grands changements extrêmement positifs au régime d'observation et d'application de la Loi électorale du Canada (la Loi). Fait important, le projet de loi C-76 a accordé au commissaire :

Ces changements sont particulièrement importants compte tenu de la surcharge du système judiciaire pénal canadien. Il me semble que, ces derniers temps, le système de justice pénale a eu tendance à minimiser les violations de la loi électorale canadienne. Comme on peut le voir ailleurs dans ce rapport, les peines récemment imposées par les juges dans nos dossiers ont généralement été des amendes peu élevées, et même les absolutions conditionnelles et inconditionnelles sont devenues plus courantes. Cette situation est quelque peu surprenante à la lumière de la déclaration sans équivoque du Parlement en faveur d'une application plus stricte des règles électorales en 2014, lorsqu'il a décidé de multiplier par dix les amendes maximales pour les infractions à la Loi. Puisque nous avons dorénavant la possibilité de traiter ces types de violations en recourant à des SAP ou à des transactions plus robustes, nous aurons probablement moins souvent recours aux tribunaux pénaux, réservant cette avenue pour les infractions les plus graves.

Le projet de loi C-76 prévoyait également la réintégration administrative de notre organisation au sein du Bureau du directeur général des élections (BDGE). Le transfert d'un bureau comme le nôtre au sein d'une autre organisation est un travail complexe et de longue haleine. Je tiens à exprimer mes sincères remerciements à nos homologues du Service des poursuites pénales du Canada (SPPC), tant pour le soutien apporté à notre Bureau pendant les quatre années où nous avons fait partie de leur groupe, que pour leur appui pendant la transition vers le BDGE. De plus, l'équipe de transition d'Élections Canada (EC), qui a travaillé en étroite collaboration avec le SPPC pour s'assurer que la transition vers le BDGE se fasse le plus facilement possible, l'a fait en dépit d'énormes contraintes de temps, tout en se préparant à une élection. Je suis extrêmement reconnaissant envers les membres de cette équipe pour leur diligence et leur travail acharné.

En plus des changements mentionnés ci-dessus, le projet de loi C-76 a également maintenu bon nombre des protections importantes contenues dans la législation précédente, en particulier celles qui concernent l'indépendance de notre Bureau. Pour moi, ces dispositions sont essentielles non seulement en raison de la réintégration administrative de notre organisation au sein du BDGE, mais aussi en raison des critiques auxquelles notre Bureau a été confronté récemment en ce qui concerne notre indépendance par rapport à l'intégrité du processus décisionnel. J'ai souligné à plusieurs reprises (et je continuerai de le faire) que toutes les décisions prises en matière d'observation et d'application des règles sont les miennes et les miennes seulement. Elles sont prises sans aucune influence de quiconque et dans un seul but : préserver l'intégrité du système et faire respecter la loi. Elles sont toujours fondées sur les considérations pertinentes décrites dans notre Politique du commissaire aux élections fédérales sur l'observation et le contrôle d'application de la Loi électorale du Canada et éclairées par celles-ci. Comme je l'ai indiqué dans une déclaration publiée le 2 mai 2019, « il n'y a jamais eu de tentative d'influencer le déroulement d'une enquête ou d'interférer avec notre travail par des représentants élus, leur personnel politique ou des fonctionnaires. Et je tiens à être clair : si cela devait jamais se produire, je le dénoncerais promptement et publiquement ».

Cela dit, malgré le fait que nous sommes soumis aux dispositions strictes de confidentialité contenues dans la Loi, je comprends parfaitement que nous avons, tant moi à titre de commissaire que nous en tant que Bureau, la responsabilité de fournir davantage d'information sur la manière dont nous effectuons notre travail et prenons nos décisions. Bien que nous ne soyons pas en mesure de fournir de détails sur les enquêtes, nous devons mieux communiquer avec la population canadienne sur qui nous sommes, ce que nous faisons et, dans la mesure du possible, pourquoi nous le faisons. Nous nous engageons à améliorer nos méthodes dans ce domaine.

43e élection générale

Toujours en lien avec le thème du changement, il est évident que les campagnes électorales modernes ne ressemblent qu'en partie à celles qui ont été menées dans le passé. Il est également évident qu'elles continueront à évoluer à un rythme que nous n'avons pas vu auparavant — un rythme qui nécessitera une sensibilisation permanente de la part des législateurs et de ceux qui appliquent la loi.

Dans cette optique, notre Bureau a consacré beaucoup de temps avant les élections à consulter nos partenaires et à échanger avec d'autres gouvernements et intervenants afin de bénéficier de leur expertise et de leur expérience. Nous avons également tiré parti des relations existantes — et en avons établi de nouvelles — avec les plate-formes numériques, afin d'assurer leur collaboration pendant et après la période électorale. Il s'agit d'un domaine dans lequel nous avons l'intention de continuer à travailler assidûment.

Je suis heureux de pouvoir dire que ces mesures nous ont bien servis et qu'en tant qu'organisation, nous étions généralement bien outillés pour traiter les questions découlant de notre mandat. Je voudrais mentionner ici que, sur la question de l'ingérence, étrangère ou autre, nous n'avons guère vu d'indications que le Canada était la cible du type d'attaques qui ont été perpétrées dans d'autres pays.

Vous constaterez tout au long du rapport, et plus particulièrement dans les sections portant sur les Questions présentant un intérêt particulier et les statistiques, qu'un certain nombre d'enjeux étaient manifestement au premier plan des préoccupations de la population canadienne. Il est encore plus intéressant de constater que les Canadiens ont communiqué avec nous en bien plus grand nombre que lors des élections précédentes. Toutefois, si nous avons constaté une augmentation du nombre de plaintes individuelles que nous avons reçues par rapport aux élections précédentes, le nombre réel de situations factuelles particulières ayant donné lieu à ces plaintes est resté relativement stable. Autrement dit, il n'y a pas nécessairement eu une augmentation au niveau des problèmes, mais ceux-ci ont pu sembler plus importants, ou ont été amplifiés, parce que nous pouvons avoir reçu de nombreuses plaintes relatives à la même infraction potentielle. Que cette amplification résulte d'une sensibilisation accrue de la population canadienne aux questions électorales ou de la diffusion de messages sur les médias sociaux pendant la campagne, nous ne le saurons peut-être jamais, mais elle aura une incidence marquée sur la manière dont nous mènerons nos travaux à l'avenir.

Avec l'ajout de nouveaux secteurs de programme découlant du projet de loi C-76, et en raison du volume croissant de nos dossiers, ainsi que de leur nature de plus en plus complexe, la taille de notre Bureau a presque doublé au cours des deux dernières années. Afin de garantir que notre structure et nos processus reflètent cette nouvelle réalité et que nous continuions à fonctionner efficacement et de manière prospective, nous prévoyons entreprendre un examen de notre organisation au cours du prochain exercice financier. Les conclusions et recommandations issues de cet examen seront examinées dans les prochains rapports. Dans l'immédiat, tout en tenant compte de l'ajout de nouveaux secteurs de programme résultant du projet de loi C-76, et afin d'assurer la continuité de nos opérations aujourd'hui comme à l'avenir, j'ai créé un poste de sous-commissaire au sein du Bureau.

Ces vingt derniers mois nous ont lancé de nouveaux défis et nous ont obligés à dépasser nos limites traditionnelles. Nous avons collaboré davantage, commencé à mieux communiquer et nous avons également regardé au-delà de nos partenariats traditionnels pour améliorer notre compréhension des problèmes auxquels nous serons confrontés à l'avenir. Notre réussite — et je crois sincèrement que nous avons réussi en cette période de changement — peut être attribuée à notre petite équipe, en pleine croissance, qui s'est attaquée de front à ces changements et à ces défis, et ce, avec enthousiasme et détermination. Les membres de notre équipe sont dévoués, professionnels et, par-dessus tout, ils aiment ce qu'ils font et y croient. Je les remercie pour tout ce qu'ils font et je suis fier de diriger l'équipe du CEF.

Yves Côté, c.r.

Commissaire aux élections fédérales





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